“Cagouillosaurus Rex” par Bastarde Maudite.
Angoulême, été de l’an 1056.
La ville est en proie à l’angoisse depuis des mois. Le manque de pluie avait considérablement asséché la région et le manque d’eau se faisait cruellement sentir.
Pour couronner le tout, les prédictions de l’évêque Cagouillot Ier sur son lit de mort n’avaient pas été d’un grand secours pour la population :
« L’Diab’ y va nous coller un cataclymsse sureu’l’coin d’la goule ! Ô’va être la boucherie, couillon ! », avait-il dit sur un ton grave et mystérieux avant de lâcher son dernier soupir.
Dans les jours qui suivirent la mort de l’évêque, une grande masse gluante apparue au loin.
Elle se dirigeait droit sur Angoulême très, très, très, très, très, très, très, très, très, très, très lentement.
Les habitants de la ville, d’abord apeurés, comprirent vite qu’il ne servait à rien de paniquer, puisque si ce gros machin était le cataclysme annoncé par l’évêque, ils auraient largement le temps de plier tranquillement leurs affaires et de bien vider leurs maisons avant de partir, puisqu’il n’était quand même pas très rapide, ce cataclysme, certes très gros, mais vraiment pas rapide…
Le gabarit titanesque ne permettait pas d’apercevoir l’animal en entier.
Elle était plus grosse qu’un dragon, sa peau était aussi visqueuse et molle que celle d’une limace et elle portait sur son dos une large coquille hérissée de piquants.
La bête laissait dans son sillage de grandes traces humides, qui engluaient de baves les fermes, les forêts et les gens, sans jamais faire de mal à personne. On commença à bien l’aimer, ce gros machin.
Et puis sa bave donnait une belle peau et humidifiait les sols, alors les gens étaient contents, c’était un peu la bénédiction de la région, finalement. Ils la baptisèrent Cagouille Royale (Cagouillosaurus Rex en latin) d’après l’évêque Cagouillot Ier.
Malheureusement, l’ardeur du soleil ne désemplissait pas. Un jour où le soleil brûlait encore plus que d’ordinaire, la bête s’écrasa aux pieds de la ville.
Le manque d’eau avait eu raison de la grande Cagouille Royale. En se décomposant, son corps se liquéfia et les sillons creusés sur son passage se remplirent d’eau, donnant ainsi naissance à la Charente.
Depuis ce jour, il y a plein de petites cagouilles sur les bords du fleuve, et les charentais ont pour philosophie de ne jamais se presser et de toujours être bien imbibés, en hommage à la Grande cagouille sacrée.